Le saviez-vous : grandeur et décadence de l’abbaye aux Dames

mardi 5 octobre 2004, par Le Bureau

Histoire

La restauration et l’aménagement du cloître de l’ancienne abbaye bénédictine de Beaumont avancent.

Les temps obscurs

Socle de la statue de Saint-Benoît

Durant onze siècles, Beaumont fut le siège d’une puissante abbaye aux dames, de règle bénédictine. Elle fut probablement fondée en 665 par Saint Genès, Comte d’Auvergne, à l’instigation de Saint Priest, évêque de Clermont. Ce dernier est également à l’initiative de la fondation de monastères féminins sur les sites qui vont devenir Royat et Chamalières ainsi que d’un hospice à Vallières, le Monasterium Colombarium. En 916 une attaque très meurtrière des Normands dévaste ces établissements. Seul le monastère de Beaumont renaît de ses cendres et à Vallières une petite chapelle miraculeusement épargnée et dédiée à Saint Guillaume (du Donjon) subsiste (jusqu’au XVIIIe) pour laisser un nom au quartier.

Que sont les dames d’antan devenues ?

Statue de Saint-Benoît

Un saisissant raccourci historique est conté par quelques dalles toujours présentes dans l’actuelle église Saint Pierre, l’ancienne abbatiale. La grande Béatrice d’Auvergne dort encore sous le chœur d’où son éternelle bénédiction évoque le mécénat qui favorisa l’essor du monastère ainsi que l’habileté dont les abbesses successives surent faire preuve pour s’entourer de la protection des puissants. Les restes des autres Dames ont disparu mais leurs pierres tombales sont adossées au mur du bas-côté sud. Eldine de Neyrat (morte en 1256) n’a que son nom et une grande croix. Elle fit pourtant acquérir à son couvent de riches terres à blé en Limagne et des vignobles en val d’Artière. Le souvenir de la prospérité du XIIIe est bien vivace. Trois moulins (Ronat, le Terrail, le Moulin des Dames) attestent de l’importance de la production céréalière. Quant au vignoble, il s’appelait tout simplement Champ Madame.

Grandeur et décadence

Les stalles

Au travers du souvenir de l’abbesse Eldine se pressent toutes les images d’un moyen âge Auvergnat et chrétien. Gerbert d’Aurillac pape en l’an mil (sous le nom de Sylvestre II), Urbain II choisissant Clermont pour prêcher la croisade, la Chaise-Dieu dominant tout le sud de l’Europe chrétienne, nous conduisent peu à peu jusqu’à une ère de grandeur qui atteindra son apogée au XVIIe siècle, sous l’autorité d’Apolline le Groing, abbesse de 1641 à 1685. Sa longue et pieuse épitaphe nous rappelle comment elle se dévoua pour les Beaumontois pauvres. Il faut avoir la curiosité d’examiner le socle de la statue de Saint Benoît sous l’arcade de la place du même nom pour découvrir qu’Apolline l’offrit aux Beaumontois en 1672. Enfin les armoiries, croix, ou autres ornements somptuaires de la dalle de Marie-Françoise de Lantilhac (1720-1780, abbesse de 1757 à 1768) ne peuvent faire oublier sa triste histoire : désignation pénible dans un couvent déjà partagé entre parti bourgeois et parti noble, conduite scandaleuse, richesses dilapidées, mise sous tutelle et démission (on disait à l’époque résignation) au profit de sa sœur Marie-Victoire. Cette dernière est la dernière abbesse d’un couvent qui disparaît avec l’abolition des ordres religieux par la Révolution. En fait le déclin de la vie monastique avait commencé le jour où les rois de France s’étaient mis à désigner les abbesses. Toutefois il avait été moins accentué qu’ailleurs, l’abbesse résidant toujours en son couvent

Le projet de la municipalité est de restaurer le cloître dans l’aspect extérieur qui était le sien à l’issue des travaux exécutés entre 1742 et 1745. Les réflexions se poursuivent pour offrir aux Beaumontois des activités nouvelles en leur rendant ces salles voûtées séculaires, élément important du patrimoine communal.

Épitaphe d’Apolline, dalle de l’abbesse Eldine et dalle de Marie-Françoise de Lantilhac