Le projet du Parti de Gauche pour l’avenir de nos retraites

mercredi 15 septembre 2010, par Pierre Cassan

SocialPolitique

Le 5 avril 2010, il y a eu très exactement un siècle que la loi sur les « retraites ouvrières et paysannes », les « ROP », a été votée : assurance pour tous ceux disposant d’un revenu limité, âge légal de la retraite fixé à 65 ans, rapidement abaissé à 60 ans dès 1912. Même s’il s’agissait encore de capitalisation, ce fut le premier texte créant un vrai régime de retraite : obligatoire et destiné à tous.
Nos retraites ont donc cent ans !

Depuis un siècle, la droite n’a eu de cesse de vouloir remettre en cause ce droit. Car celui-ci est subversif à plus d’un titre. Les retraites par répartition reposent en effet sur un prélèvement sur la richesse produite qui échappe au capital. Elles sont un élément clé du partage des richesses dans notre pays. De plus, elles reconnaissent le droit de chacun à vivre sans travailler pendant une partie de sa vie, ce qui était autrefois le privilège exclusif des rentiers. Notre système de retraites concentre donc des enjeux économiques et symboliques considérables. Cela en fait une cible de choix pour tous ceux qui veulent « réformer » la société française dans un sens plus favorable aux intérêts du capital. Les retraites ont été souvent attaquées. Elles le sont aujourd’hui à nouveau par le projet de réforme du gouvernement Fillon.

La retraite est un droit pas une aumône

Une phrase de Jaurès résume au mieux la position de la gauche vis à vis de cette loi instituant les retraites ouvrières et paysannes : « Nous la votons pour avoir le principe, nous la votons malgré les sacrifices qu’elle impose à la classe ouvrière. Mais, demain, nous vous demanderons un âge abaissé, (…) demain nous vous demanderons une retraite plus élevée, une participation plus large des assurés
à la gestion des caisses … »

C’est dans cette histoire là que nous nous inscrivons : nous sommes les héritiers de celles et ceux qui ont lutté pour obtenir des droits tout en sachant qu’il faudrait ensuite les rendre effectifs et les approfondir.

Notre ligne de conduite est simple : « La retraite dans le vrai sens du mot, dans le sens normal du mot, est une somme suffisante pour permettre au vieillard, (…) de continuer sans autre élément, sans autre discours, dans le milieu où il a vécu jusque là une existence décente et indépendante ». Jaurès encore …

Nous sommes face un choix de société : quelle place réserve-t-on aux personnes de plus de 60 ans, sachant que l’espérance de vie en bonne santé générale est de 59 ans pour un ouvrier et de 69 ans pour un cadre (données INED). L’allongement de l’espérance de vie après 75 ans pour les hommes et 83 ans pour les femmes n’a pas de conséquence directe sur l’état de santé à 60 ans. Les plus de 60 ans représentent 22,6 % de la population et le total des retraites versées 12,8 % du PIB. Il n’est donc pas scandaleux que si leur part augmente dans la population, les ressources les concernant augmentent en conséquence. Par ailleurs, le rapport actifs-retraités n’est pas aussi négatif en France que dans les autres pays d’Europe. Mais surtout, ce qui importe ce n’est pas le nombre d’actifs potentiels mais bien le nombre de cotisants car des actifs au chômage ne peuvent participer au financement des retraites. Il est donc regrettable que le COR n’ait pas souhaité faire de simulation sur la base du taux de l’indice de fécondité finale actuel de 2,1 puisque ses calculs de 2007, avaient démontré que le passage du taux de fécondité de 1,7 à 1,9 entraînait une diminution de 40 % des besoins de financement à l’horizon 2050 à paramètres constants.

Les retraités ne sont pas une charge mais une richesse pour le pays. La philosophie implicite du projet gouvernemental est que chacun doit travailler jusqu’à ce qu’il ne soit plus en état de le faire. La possibilité qu’une personne en bonne santé puisse vivre sans être soumis au travail salarié et au rapport de subordination qu’il implique serait alors niée. Qui peut pourtant contester le rôle social que jouent aujourd’hui ceux que l’on appelle souvent les « jeunes retraités » parce qu’ils sont encore très actifs ? Leur activité libre produit de la richesse pour tous : développement des associations, contribution à la vie civique, enrichissement des relations familiales, développement de services socialement utiles…Plus fondamentalement, la retraite est un droit parce qu’il est légitime de ne pas passer toute sa vie à la gagner. Il nous faut réhabiliter le droit au temps libre, le droit à la lenteur, à la rêverie et y compris le droit à ne rien faire à l’opposé de cette course à la concurrence, à la compétition qu’on veut nous dicter constamment.

La remise en cause du droit au départ à 60 ans et l’allongement de la durée de cotisation que veut imposer le gouvernement signifierait donc à la fois une nouvelle dégradation du partage inégal des richesses dans notre pays et la remise en cause du droit à des retraites pleinement émancipatrices. Nous la refusons donc pour cette double raison.

La réforme générale du système des retraites qui est envisagée par le gouvernement et le Medef n’est pas non plus acceptable dans ses objectifs : passer d’un dispositif à « prestations définies » à un système « à cotisations définies ».

Nous voulons préserver et consolider le double acquis de 1945 :

  • maintenir un régime par répartition, c’est-à dire dans lequel les cotisations des actifs paient les retraites versées. Ce régime s’oppose à celui de la capitalisation, dans lequel l’épargne que représentent les cotisations est accumulée dans des fonds de pension, et ensuite reversée sous forme de rente viagère. Faut-il souligner combien dans une économie casino un tel système est un miroir aux alouettes, l’épargnant/retraité risquant à tout instant de perdre son capital ; c’est ce qui est arrivé au Chili, c’est ce qui est arrivé à tous ceux dont le retraites sont tributaires des fonds de pension anglo-saxons. Dans un tel système il n’y a pas de droit, il n’y a que des risques. Ce serait une formidable régression.
  • préserver et élargir le système de « prestations définies » qui est celui du Régime général. Dans ce cadre, la future pension de retraite pour une carrière complète est connue : 50% du salaire jusqu’à un montant de 2.885 euros - et les critères du départ à la retraite sont définis à l’avance : nombre d’annuités, âge de départ à taux plein. Ce sont les cotisations qui doivent être calculées en conséquence pour arriver à l’équilibre financier. Nous refusons clairement d’aller vers un système à « cotisations définies », tel que étudié par le COR, car dans le cas des régimes par points ou celui des comptes notionnels, le montant de la pension est inconnu. Nous refusons que nos retraites puissent être remises en cause subrepticement.

Stop aux reculs

L’indexation des retraites sur les prix et non plus sur les salaires (1987), l’augmentation de la durée de cotisation de 37,5 ans à 40 (privé Balladur 1993, public Fillon 2003) et le calcul du salaire de référence sur les 25 meilleures années et non plus 10 (1993) devaient tout régler. Le résultat est connu. Les comptes sont encore en rouge et le nombre de retraités pauvres a brutalement augmenté.

  • Conséquence du calcul sur les 25 meilleures années, le taux de remplacement, c’est-à-dire le rapport entre le montant de la retraite et le salaire de fin de carrière, qui était de 78% en 1993, 72% en 2007 devrait selon les prévisions du Comité d’Orientation des Retraites (COR) ne plus être que de 65% en 2020 et 59% en 2050.
  • Cumulé avec la dégradation de l’emploi, ce mode de calcul des pensions entraîne la paupérisation d’un grand nombre et en tout premier lieu des femmes dont 30 % doivent attendre 65 ans pour pouvoir prendre une retraite à taux plein contre 5% des hommes (retraite moyenne des femmes : 826 euros). C’est ainsi qu’aujourd’hui 10% des 14,5 millions de retraités ont un revenu inférieur au seuil de pauvreté de 910 euros.
  • Le pouvoir d‘achat des retraités est bloqué ! Mais une telle indexation masque en réalité une diminution du pouvoir d’achat car l’indice des prix sous-estime lourdement la réalité. Le recul des droits ne touche donc pas que les futurs nouveaux retraités, il atteint aussi les anciens
    retraités.

Le retour à l’équilibre est possible : nos propositions

Le problème des retraites n’est pas essentiellement lié à la démographie mais à l’insuffisance d’emplois.
Le nombre de retraités est passé de 7 millions à 15 millions de retraités en 3 décennies sans quasiment de hausse de cotisation. C’est la création d’emplois, environ 2 millions en 10 ans, qui a permis de financer cette augmentation. Le document d’orientation présenté par le gouvernement reconnaît lui-même qu’une baisse du chômage diminuerait fortement le besoin de financement. Mais il ne fait rien pour y parvenir. Et il prend comme base de ses calculs un chômage de 7 ou 4,5%, excluant par avance le retour au plein-emploi.

L’insuffisance actuelle de recettes est très largement due aux effets de la crise et à la montée du chômage qui en est la conséquence. 680 000 emplois net ont ainsi disparu en moins de 18 mois ce qui représente environ 300 milliards de perte pour les régimes de retraite pour les 15 ans à venir en raison de la chute de la masse salariale.

Il est possible de garantir l’équilibre des régimes de retraites (tous et pas seulement le Régime général) à très court terme et jusqu’à l’horizon 2020. A cet horizon cela nécessite de rechercher selon les prévisions du COR de 40 à 50 Md€ (entre 1,7 et 2,1 pts de PIB) de recettes supplémentaires.

En résumé, à législation constante, il faut parvenir à mobiliser entre 1,7 et 2,1 points de PIB à l’horizon 2020 pour retrouver l’équilibre financier. Le déficit de 2010 de 32,2 milliards est à comparer avec les profits distribués qui représentent 4% du PIB soit 76,84 milliards et servent surtout ou à spéculer ou à des dépenses somptuaires par ailleurs très souvent néfastes pour la planète.

Le système actuel peut être renforcé et amélioré

Au-delà de ce retour à l’équilibre financier à législation constante, le Parti de Gauche refuse la régression qu’impliquent les mesures Balladur-Fillon et notre projet est de revenir dès que possible à des dispositions plus favorables ; cela aura un coût supplémentaire, on peut l’estimer à environ 3 points de PIB à l’horizon 2020, soit 60 milliards d’euros actuels.

Nos propositions sont axées autour des principes suivants :

  • garantir le droit au départ à 60 ans et le rendre effectif dans les régimes complémentaires, où l’âge de départ reste fixé à 65 ans. Cette possibilité de départ doit se faire sans pénalisation quelle que soit la durée de cotisation (suppression de la décote).
  • assurer un taux de remplacement moyen d’au moins 75 % du dernier salaire. Cela suppose d’aller vers la remise en cause des mesures qui ont provoqué la baisse :
    • le calcul des retraites sur les 25 meilleures années au lieu des 10 meilleures années dans le privé. Dans la situation actuelle de l’emploi — emplois précaires, chômage — le calcul du salaire de référence sur 25 années pénalise dramatiquement tout ceux qui ont eu à la subir.
    • l’indexation des retraites sur les prix et non plus sur les salaires. Le pouvoir
      d’achat des retraites ne doit pas être « cristallisé » au moment de leur liquidation ; le pouvoir d’achat des retraités ne doit pas être décroché de l’évolution générale mais la suivre. Il en va d’ailleurs de même des « salaires portés au compte ».
  • permettre à ceux qui ont des carrières longues de partir à taux plein, même avant 60 ans. Depuis trois ans qu’elles sont supposées avoir été engagées, les discussions sur la pénibilité voulues par les organisations syndicales n’ont toujours pas permis de déboucher. L’inégalité des carrières, l’inégalité des espérances de vie en retraite rendent le régime actuel antiredistributeur. Il est temps de mettre fin à cette injustice. Tous ceux qui ont commencé à travailler tôt doivent pouvoir partir en retraite à taux plein, dès lors que leur carrière est complète.
  • faire qu’aucune retraite ne soit en dessous du SMIC. La loi Fillon de 2003 fixait 85 % du SMIC comme objectif, qui n’est évidemment pas atteint. Mais qui peut vivre dignement aujourd’hui avec si peu ? Il faut donc augmenter fortement le minimum contributif pour y parvenir et l’indexer sur le SMIC pour éviter le décrochage continuel tel qu’il existe actuellement.
  • valider les périodes de chômage en référence au salaire antérieur.
  • réfléchir à la prise en compte d’une partie des années d’études. Le développement de la scolarité fait désormais partie des nécessités sociales ; aujourd’hui le dispositif de rachat des annuités est prohibitif et de fait réservé aux plus riches.

Les richesses pour financer de telles mesures existent. Selon le rapport du COR, le PIB atteindrait 3 800 milliards en 2050 et le déficit des retraites 115 milliards d’euros, soit un peu plus de 3 % du PIB. Donc indépendamment de la validité d’une telle estimation du PIB en 2050, si ce scénario se réalisait, 3 points de PIB en plus pour les retraites ne représente pas un fardeau excessif. En effet, une autre répartition des richesses est possible. Il suffit de rétablir un autre rapport entre la part des salaires qui a baissé de plus de 8 points en 30 ans et la part du capital.

Plusieurs leviers peuvent permettre d’y parvenir :

  • une politique volontariste de création d’emplois et de reconversion écologique (dans un régime par répartition, le volume des cotisations est décisif pour assurer le financement ; à titre d’exemple la création de 300 000 emplois par an de 2010 à 2020 rapporterait 24 Md€ par an en retour pour les retraites). Pour garantir l’équilibre de l’ensemble des régimes de retraite, la solution n’est pas de faire travailler plus longtemps des salariés déjà épuisés. C’est au contraire d’offrir un emploi à tous les chômeurs dont les plus de 50 ans ainsi que l’accès au plein temps pour tous les salariés, surtout des femmes, victimes des temps partiels contraints, deux options qui n’ont pas été retenues par le COR.
    Le retour à un taux de chômage frictionnel de 3% est possible mais ce n’est pas l’option du capitalisme financier qui veut poursuivre la pression sur les salaires pour continuer à favoriser les profits des actionnaires qui ont pourtant explosé en vingt ans au détriment des revenus du travail. Pourtant l’arrêt du bradage de l’industrie et de certains services par les délocalisations, le soutien à une production socialement et environnementalement responsable et une reconversion écologique de l’économie privilégiant les circuits courts entre production et consommation ainsi que des produits réparables permettraient un maintien et une création massive d’emplois et donc les recettes nécessaires pour la protection sociale.
  • une augmentation des cotisations patronales (suppression des exonérations, instauration d’une surcotisation sur les emplois précaires et à temps partiel, augmentation du plafond de cotisation, hausse du taux de cotisation…). Le gouvernement refuse cette option. Pour cela il dramatise l’augmentation nécessaire de 3,8 points en 2010, sans signaler qu’il s’agit d’une année de crise. Il prétend qu’une telle augmentation menacerait l’emploi. En réalité elle menacerait seulement le niveau historiquement élevé des profits. Rappelons que le taux des cotisations patronales n’a pas augmenté depuis 1979 (à part le transfert d’une cotisation d’allocation familiale lors de la création de la CSG en 1991) et qu’il a même diminué de fait avec les exonérations dégressives jusqu’à 1,5 fois le SMIC.
  • un élargissement de l’assiette des cotisations à l’intéressement, à la participation, à l’épargne salariale et aux stock options au même taux que la masse salariale. Il faut aussi revoir la taxation des retraites chapeau. Pour l’heure le gouvernement se contexte d’une formule : « le Gouvernement n’exclut pas, dans une logique d’équité, de prévoir de nouveaux prélèvements sur des assiettes et des revenus ciblés. » La prudence et le flou de cette phrase signale que, si seulement elle voyait le jour, il ne s’agirait au mieux que d’une mesure d’affichage symbolique. En fait, le gouvernement ne prévoit aucune recette supplémentaire pour les caisses de retraite puisque cette contribution est prévue pour abonder le Fonds de Solidarité Vieillesse dont le déficit atteint 3,2 milliards d’euros.
  • la suppression du bouclier fiscal, un prélèvement sur les profits des banques, une taxation des revenus financiers et des dividendes versés aux actionnaires permettraient de boucler le financement nécessaire.

Nos pistes de réflexion pour une réforme ambitieuse

Au-delà des orientations que nous opposons au projet du gouvernement, nous souhaitons ouvrir une réflexion sur le système de retraites que mettrait en place un gouvernement du Front de Gauche.

Savoir où aller, c’est d’abord se souvenir de ses origines : l’ordonnance fondatrice d’octobre 1945 sur la Sécurité sociale. Son exposé des motifs mérite d’être rappelé ; il souligne, en des termes qui sont toujours d’actualité, les principes constitutifs qui sont au fondement de notre sécurité sociale ; ceux là mêmes que nous opposons aux coups que la droite voudrait porter à notre protection sociale.

« La Sécurité sociale est la garantie donnée à chacun qu’en toutes circonstances il disposera des moyens nécessaires pour assurer sa subsistance et celle de sa famille dans des conditions décentes. Trouvant sa justification dans un souci élémentaire de justice sociale, elle répond à la préoccupation de débarrasser les travailleurs de l’incertitude du lendemain, de cette incertitude constante qui crée chez eux un sentiment d’infériorité… » « La Sécurité sociale appelle l’aménagement d’une vaste organisation nationale d’entraide obligatoire qui ne peut atteindre sa pleine efficacité que si elle présente un caractère de très grande généralité à la fois quant aux personnes qu’elle englobe et quant aux risques qu’elle couvre. Le but final à atteindre est la réalisation d’un plan qui couvre l’ensemble de la population du pays contre l’ensemble des facteurs d’insécurité ; un tel résultat ne s’obtiendra qu’au prix de longues années d’efforts persévérants …. »
Ambitieux, prématuré, au lendemain de la Libération, ce projet s’est heurté aux résistances de certaines professions et n’a pu être pleinement concrétisé.

L’histoire nous a donc laissé une multiplicité de régimes entraînant des inégalités significatives. Or à carrière similaire, le montant de la retraite devrait être équivalent. Actuellement, si les petites retraites du secteur public sont un peu meilleures, sauf pour les femmes, que celles du secteur privé, les cadres du public sont eux désavantagés. Ainsi la retraite moyenne versée par la CNACRL (fonction publique hospitalière +territoriale) est de 1150 euros contre 1200 euros en moyenne dans le secteur privé. Seule la moyenne de la fonction publique d’Etat est plus élevée à 1800 euros, mais cela est dû au poids des enseignants qui relèvent de la catégorie A. En réalité, mieux vaut être un cadre retraité de Total que d’EDF.

C’est pourquoi, afin de donner aux retraites une lisibilité qu’elles n’ont pas, nous voulons conforter et élargir le Régime général.

Par ailleurs, les salariés subissent désormais des carrières professionnelles multiples, heurtées, morcelées, ce qui se traduit au moment de la retraite par l’addition de plusieurs pensions de retraites souvent pour des petits montants, chacune dépendant de règles différentes, et dont le total est incompréhensible. La situation de « polypensionné » est désormais très largement répandue et ne cesse d’augmenter.

N’est-il pas temps, dans le respect des spécificités propres aux différents régimes, que les salariés, et de façon plus large tous ceux qui relèvent d’un « régime aligné » (salariés agricoles, RSI) puissent se retrouver dans un dispositif clarifié ?

Deux voies d’évolution, distinctes mais complémentaires peuvent être envisagées :

Le régime général a vocation à devenir le régime de base de tous. Les règles de liquidation des retraites du Régime général s’appliquent d’ores et déjà aux retraites de base des régimes dits « alignés » ; d’autres régimes pourraient faire leurs, ces règles. Leur spécificité se matérialisant par la création d’un régime complémentaire spécifique permettant aux différentes catégories de salariés de préserver les droits qui sont les leurs.
Le régime général a vocation à devenir le régime unique des salariés. L’existence d’un « salaire plafond » limite l’espace contributif du RG. Ainsi les retraites qu’il sert sont insuffisantes pour assurer les « moyens suffisants » voulus par l’ordonnance de 1945. Aussi, cette insuffisance a-t-elle entraîné la création des régimes complémentaires du privé : rapide pour les cadres (l’AGIRC a été créé en mars 1947), tardive pour les non cadres (l’ARRCO date de décembre 1961). Le RG pourrait progressivement conquérir cet espace ; le déplafonnement des cotisations en serait un levier essentiel.

Conclusion

Au-delà de la répartition des richesses, c’est un choix de société qui se joue.

Ce n’est pas l’intérêt général des retraités et futurs retraités qui guide les choix du gouvernement. Alors que les Etats se sont lourdement endettés pour sauver les banques, les plus « fragiles » comme la Grèce sont aujourd’hui attaqués — avec le concours des agences de notation internationales qui déterminent la « solidité » des emprunts réalisés par les Etats — par une spéculation qui s’enrichit sur leur dette. Avec sa contre-réforme de régression sociale et d’austérité budgétaire, Sarkozy veut envoyer aux financiers et aux banquiers un message destiné à les rassurer : la politique menée préservera leurs profits !

Nous n’acceptons pas cette logique capitaliste libérale qui fait fi du bien-être des populations.

Depuis un siècle et demi, les progrès technologiques, les gains de productivité, les luttes sociales, ont permis la diminution du temps de travail et l’augmentation du temps libre, par la réduction journalière (journée de 8 heures) ou hebdomadaire (48, 40, 35 heures), par la réduction annuelle (congés payés), par la réduction sur la vie (retraite à 60 ans). On travaille aujourd’hui deux fois moins qu’en 1900 mais on produit beaucoup plus de richesses. Il nous faut maintenant de plus prendre en compte les limites de la planète. Cela n’invalide pas l’exigence d’une autre répartition des richesses, au contraire, cela exige d’intégrer la solidarité et la responsabilité par rapport à notre planète dans la réflexion sur le type de répartition des richesses à l’échelle de notre pays et plus globalement donc à l’échelle planétaire. L’alternative est donc entre les exigences de rentabilité du capital et les aspirations au progrès et à l’émancipation humaine.