La Sécu est-elle toujours un bien commun ?

mardi 16 février 2016, par Gaël Drillon

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La Sécurité sociale fête ses 70 ans. D’aucun n’oserait évoquer la fin proche de cette institution tellement elle est inscrite dans le patrimoine de notre nation : 95 % des personnes interrogées se déclarent tout-à-fait ou plutôt d’accord avec l’affirmation « La Sécurité sociale est une institution à laquelle vous êtes attaché(e). » [1]. La Sécurité sociale a atteint ce statut particulier de [bien commun], sans que débat il y ait ! Pourtant, c’est bien cette absence de débat sur les fondements de la Sécurité sociale qui risque de mettre un terme à son devenir ainsi qu’à toutes formes de démocratie sociale ? La Sécu est-elle toujours un [bien commun] ? « Plus encore que son équilibre financier, le système français de Sécurité sociale semble être à la recherche de sa propre signification et éprouver quelques difficultés à se situer par rapport aux perspectives modernes. » [2]. Cette contribution se propose de poser les bases d’un débat qui n’a que trop attendu, de livrer le regard d’un autodidacte, et d’envisager l’opportunité de liens entre la préoccupation de la cohésion sociale, et l’impératif de la rénovation démocratique.

Le [commun] Sécurité sociale

La Sécurité sociale est née dans le contexte spécifique d’après guerre. Le peuple était uni pour sa sauvegarde. Cette union nationale, au-delà des idéologies politiques, a présidé à la décision de mesures sociales comprenant la mise en œuvre d’un plan complet de Sécurité sociale : « assurer à tous les citoyens des moyens d’existence, dans tous les cas où ils sont incapables de se le procurer par le travail, avec gestion appartenant aux représentants des intéressés et de l’État ». Aujourd’hui toujours, ce dispositif de Sécurité sociale repose sur des régimes attachés à des caractéristiques professionnelles, garants de la solidarité nationale (article L-111-1 du Code de la Sécurité sociale). Chacun se caractérise par un ensemble de dispositions s’appliquant à un groupe donné de personnes, et par une organisation administrative destinée à en gérer la mise en œuvre en associant les représentants des personnes affiliées. Outre le régime général, qui couvre l’ensemble des salariés du secteur privé et le régime des travailleurs non salariés, les régimes agricole (salariés agricoles et exploitants) et indépendant (artisans et commerçant – régime très récent : 2008) constituent les régimes de base ; une quinzaine de régimes spéciaux complète ce socle : régime des militaires, régime de la SNCF (Société nationale des chemins de fer), régime des industries gazières, régime des notaires, etc.

La Sécurité sociale est ainsi, depuis son origine, tout à la fois un éventail de prestations de solidarité (la mission), un maillage d’organisations en réseaux (le système), et un modèle de dialogue social (la gouvernance). La fourniture des prestations (mission) s’intéresse aux principaux risques sociaux, liés à la perte de capabilités [3] lors d’un événement de la vie : accidents du travail, maladie, maternité, enfant, retraite… Les organismes gèrent l’ensemble des risques couverts, à l’exception du régime général qui, du fait de son ampleur, dispose d’une organisation spécialisée en branches : Cpam (Caisse primaire d’assurance maladie) ; Caf (Caisse d’allocations familiales) ; Carsat (Caisse d’assurance retraite et de santé au travail) ; Urssaf (Union de recouvrement de Sécurité sociale et d’allocations familiales).

Du point de vue organisationnel (système), la Sécurité sociale se structure depuis 1945 en réseaux pour les principaux régimes. Des organismes en proximité, juridiquement indépendants, agissent sous la coordination de têtes de réseaux (caisses nationales), animatrices de chantiers nationaux et/ou de démarches communes. Selon les réseaux, la nature des organismes varie, de l’entreprise privée à l’organisme mutualiste. Cette organisation plaçait théoriquement, à ces débuts, le pouvoir de décision au plus près de la mise en œuvre des actions, donnant une large place à l’initiative locale dans sa modélisation initiale.

Enfin, la Sécurité sociale dans sa conception initiale (ce n’est plus le cas actuellement) constituait un modèle original de (gouvernance) participative, où le dialogue social était au cœur de la décision. Chaque organisme, à l’échelon local ou national, était dirigé par une instance composée de représentants de la communauté (représentants indirects issus des syndicats pour le régime général, ressortissants du régime pour le régime agricole) et de personnes qualifiées désignées par l’État. Une équipe de direction était en charge de l’exécution des missions et de la gestion de l’organisme sous le contrôle de l’instance. C’était un exemple probant de démocratie sociale institutionnalisée à grande échelle.

Ce modèle de Sécurité sociale à la française est-il conforme à la notion de [bien commun] : « une ressource partagée par un groupe de gens » [4] ; « des ressources gérées collectivement par une communauté selon une forme de gouvernance qu’elle définit elle-même » [5] ? Les [biens communs] constituent l’expression de la démarche d’institutionnalisme [6]… c’est-à-dire de la capacité des citoyens à s’organiser et s’autogouverner sans l’intervention d’une autorité privée ou publique. Il s’agit de relations sociales entre des personnes qui s’accordent autour de règles communes, pour partager une responsabilité et un usage.

La Sécurité sociale respectait donc les caractéristiques normatives des [biens communs] à sa création, au même titre que les connaissances, l’eau, la terre… Au-delà, nous pouvions donner à la Sécurité sociale le statut de [commun] car elle résultait « […] d’une décision collective, d’un acte volontaire qui institue un système de règles régissant des modes d’existence et d’activités en communauté. » [7]. Cette nuance, entre [bien commun] et [commun], est essentielle car elle place la Sécurité sociale au niveau de sa nature politique : « Notre qualité de vie sur la planète […] dépend de la reconnaissance, par nous-mêmes, de notre pouvoir collectif. » [8], c’est-à-dire le fruit d’un acte de conscience collective, d’une délibération continue et d’une décision participative. Alors qu’un bien (quel qu’il soit) reste de nature juridique, c’est-à-dire un acte d’autorité donné par le droit de la propriété, et limitant toute prise de conscience autre que par le propriétaire.

L’exemple de la gestion du fleuve [Le Nil] [9], en Égypte, permet de percevoir cette nuance : [commun] parce qu’eau naturelle, le [bien] fleuve est exploité par une autorité publique à des fins économiques, éloignant toutes les populations locales des opportunités pour une agriculture locale durable. À l’inverse, la lutte Bolivienne de Cochabamba [10], ou la mobilisation dans la région du Rajasthan [11], près de Jaïpur en Inde, sont des exemples probants autour du [commun] eau. Dans ce dernier exemple, la force de la volonté et du dialogue ont permis, aux populations d’une zone reconnue en stress hydrique, de recréer une oasis verte et de développer leur bien vivre en commun, en dehors de toute décision publique.

Ainsi, la Sécurité sociale dans son modèle d’origine n’était ni un bien privé, car n’appartenant pas à un propriétaire physique ou moral unique, ni un bien public, car gérée autrement que par l’autorité de l’État, ni même un bien au sens strict, puisque système en mouvement par le fait de la délibération et de la décision partagée [7]C’est l’âme de la Sécurité sociale de 1945 : un [commun] institutionnalisé au cœur du droit français (Code de la Sécurité sociale) ! Un [commun] où chacun était acteur, du fait de son usage des prestations, de sa contribution via les cotisations, et de son pouvoir de décision via ses représentants dans les instances paritaires.

Si la Sécurité sociale était un [commun], elle l’était d’autant plus qu’elle présentait également d’autres caractéristiques précises : d’une part, l’utilité sociale, c’est-à-dire qu’elle contribuait (et contribue toujours) au bien vivre ensemble grâce à des qualités de ressources ou de patrimoines collectifs pour la vie et les activités humaines [12] ; d’autre part, la non exclusivité, soulignant que l’on ne pouvait que difficilement en empêcher l’accès au plus grand nombre à l’instar de l’air [13] ; et enfin, la rivalité qui s’entendait à l’époque, et c’est toujours le cas, par le fait que l’usage par les uns pouvait en interdire l’appropriation ou l’exploitation par les autres, comme une zone de pêche par exemple [13].

Sur la première caractéristique, la Sécurité sociale présente toujours et indéniablement une utilité collective et/ou un intérêt général [14] [15]. C’est un socle fondamental de notre bien vivre ensemble et un amortisseur de crises économiques et sociales. Depuis 70 ans, la Sécurité sociale a permis de réaliser de formidables progrès sociaux. Rappelons dès lors deux articles importants et marquants :

Article 1er de l’ordonnance du 4 octobre 1945 – Il est institué une organisation de la Sécurité sociale, destinée à garantir les travailleurs et leurs familles contre les risques de toute nature susceptibles de réduire ou de supprimer leur capacité de gain, à couvrir les charges de maternité et les charges de famille qu’ils supportent.
Article 22 de la Déclaration universelle des droits de l’homme – Toute personne, en tant que membre de la société, à droit à la Sécurité sociale ; elle est fondée à obtenir satisfaction des droits économiques, sociaux et culturels indispensables à sa dignité et au libre développement de sa personnalité, grâce à l’effort national et à la coopération internationale, compte tenu de l’organisation et des ressources de chaque pays.

De même, la Sécurité sociale était non exclusive dès 1945, parce que la volonté était clairement de ne pas en empêcher l’accès par tout un chacun. La Sécurité sociale concernait, tout au long de la vie, chacun des citoyens si l’on considère un subtil équilibre à cet époque entre la logique Bismarckienne de contribution par grands corps professionnels et la période de plein emploi à la création du système. Dès son origine, et même avant (loi du 9 avril 1898 relative à la prise en charge des accidents du travail des salariés de l’industrie), la Sécurité sociale a placé cette ambition, paradoxalement Beveridgienne, au cœur de son système : offrir à tous une couverture minimum dans le cadre d’une protection attachée au statut professionnel.

Enfin, la Sécurité sociale était rivale, parce que son usage par les uns pouvait déjà altérer (diminuer) l’usage par les autres. C’est encore plus le cas 70 ans après, bien entendu. Cette relation est indirecte et insidieuse. Les dépenses sociales (santé, dépendance, retraite) entament le budget de la Sécurité sociale. D’un point de vue strictement théorique, une surconsommation des uns peut entraîner un tel déséquilibre financier que l’accès, au même niveau de prestations, par les autres, pourrait être remis en cause.

Une mutation discrète ?

Pour autant, est-ce que la situation actuelle est conforme avec cette perception historique de [bien commun] ancrée dans l’imaginaire collectif [16] ? Est-ce que la Sécurité sociale a su préserver son âme au fil du temps ? Est-ce que les réformes connues par notre système de solidarité nationale n’ont pas changé la donne, sous de faux prétextes ? La Sécu est-elle toujours un [commun] ? Au cours de ces 70 années d’histoire, la Sécurité sociale française a vécu un nombre élevé de réformes (pour la seule Assurance maladie, 16 réformes entre 1977 et 2004). Le discours ambiant valorise ce constat en soulignant une haute capacité d’adaptation des personnels de Sécurité sociale… c’est vrai ! Mais ce discours masque des changements profonds dans l’âme de la Sécurité sociale.

Réforme importante, sinon la plus importante de toutes, la loi constitutionnelle de 1996, suivie des lois de 2005 et 2008, modifie la Constitution de 1958 en ajoutant un alinéa dans son article 34 relatif aux pouvoirs du Parlement. Ce faisant, cette suite de réformes crée [17] un lien direct entre les finances sociales et les finances publiques et installe le Parlement, mais surtout le Gouvernement [18] [19], au sommet de la chaîne décisionnelle en matière de dépenses et de recettes sociales. La loi de financement de la Sécurité sociale donne les orientations de la politique de Sécurité sociale, ainsi que les objectifs qui déterminent les conditions générales de son équilibre financier. Elle établit des prévisions de recettes, des objectifs de dépenses et les conditions de l’équilibre des comptes sociaux. Les Conventions d’Objectifs et de Gestion (COG), pour chaque régime, formalisent une démarche contractuelle entre l’État et les têtes de réseau (ordonnance n° 344 du 24 avril 1996). Ces contrats, impulsés par l’État, renforcent la pression de la performance attendue au sein des organismes de Sécurité sociale, avec une démarche objectifs - résultats.

De plus, la révision de 2008 limite le cadre d’utilisation de l’article 49-3, qui permet l’adoption d’une disposition par le gouvernement sans vote d’un projet de loi. Mais elle maintient son champ aux projets de loi de finances et de financement de la Sécurité sociale. C’est bien là le « nerf de la guerre » dont découlent toutes mises en œuvre. Cette exception marque clairement la main mise de l’État sur le [commun] Sécurité sociale, au cœur du droit français.

Il est intéressant de voir aussi que, depuis la loi du 13 août 2004, l’instance paritaire de l’Assurance Maladie (régime général) est confinée à un rôle consultatif et à la discussion, avec l’État, de son contrat pluriannuel (articles L-182-2 et L-182-2-1-1 du Code de la Sécurité sociale). C’est moins explicite pour les autres branches ou régimes de la Sécurité sociale : l’article L-200-3 du même code souligne le « pouvoir consultatif des organismes sociaux ». Ainsi, la gouvernance de la Sécurité sociale n’est plus le fruit du dialogue social. Le système a muté discrètement vers un management public par la performance, à l’instar d’autres organisations centrée plus particulièrement sur la rentabilité économique, plus que sur l’utilité sociale.

D’autres signaux confirment la disparition d’une gouvernance négociée : les exonérations de cotisations sociales par exemple. Ces mesures sont décidées majoritairement dans le cadre d’un projet gouvernemental (avec une intention politique) pour agir sur l’emploi ou sur la compétitivité : réduction Fillon… Outre le fait que ces dispositifs d’États peuvent être contestés sur leur caractère équitable entre les petites et les grandes entreprises, ils sont surtout contestables dans le fait qu’ils viennent déséquilibrer un ensemble théoriquement négocié dans le cadre du dialogue social. Le manque à gagner est énorme pour les comptes de la Sécurité sociale, ces derniers devenant de fait une marge d’ajustement des comptes publics de l’État. Parfois, les exonérations sont compensées par une réaffectation de la TVA (Taxe sur la Valeur Ajoutée des biens de consommation), avec reversement au budget de la Sécurité sociale. C’est une manière de fiscaliser le système. Mais ce reversement n’est pas une règle absolue : la dette de l’État à l’égard de la Sécurité sociale avoisine 368 millions d’euros en 2014 [20], signifiant clairement une position de dépendance de l’institution « commune » vis-à-vis du bien géré par l’État unilatéralement.

D’autre part, à défaut d’organiser un débat de fond sur le financement de la Sécurité sociale (faire démocratie sociale), le système utilise des techniques empruntées à la sphère capitalistique. La voie choisie par l’autorité publique est la constitution d’une dette sociale (le fameux trou de la Sécu), qui correspond à un artifice de gestion de l’écart entre les dépenses et les recettes du système. Cette solution est moins exposée à la défiance populaire, parce que masquée par un dispositif d’amortissement de la dette. En effet, les organismes de Sécurité sociale ont recours quotidiennement à l’emprunt pour l’amortissement de cette dette confiée à la CADES (Caisse d’Amortissement de la DEtte Sociale). Ce système, de plus en plus dépendant des marchés de capitaux, est exposé aux risques financiers, notamment les fluctuations des taux d’intérêts et du prix des actifs. A titre d’exemple, sur l’ensemble de la période 2003-2010, la somme des intérêts payés par l’Acoss [21]) s’est élevée, selon la Cour des comptes, à 2,6 milliards d’euros [22].

Le système lui-même, de l’intérieur, est bousculé par ce management public inspiré par la logique économique, hors de son utilité sociale propre. Une fracture d’autant plus violente dans un corps professionnel historiquement animé par l’application et le dévouement [23] [24]. La recherche accrue d’une stricte rentabilité se diffuse jusqu’aux pratiques managériales. Un phénomène parfaitement décrit [25] de « burn-out » qui touche au sens de l’agir ensemble. Les nouveaux codes de management en vigueur dans tous les secteurs, y compris le secteur public, démantèlent ces solidarités internes [26] et cette puissance de coopération : « Le pouvoir jaillit parmi les hommes quand ils agissent ensemble. » [27]. Le management public mobilise paradoxalement des valeurs humanistes, alors que la pratique s’appuie sur des objectifs individualisés et la rentabilité « humano-sécanique ». Il est demandé aux individus de suivre des modèles conformes, à grand renfort de référentiels et de prescriptions, tout en étant créatif… le syndrome d’ « autonomie contrôlée » observé chez IBM dès 1970. « Ces nouvelles puissances de l’argent nous pressent de nous adapter à un monde qui interdit toute réflexion sur les fins, transforment les travailleurs de la connaissance en tâcherons de l’ignorance » [28]. Ce phénomène est aussi verbalisé par les personnels de la Sécurité sociale, de manière diffuse, dans le cadre d’un baromètre social institutionnel [24]. 28 % des salariés de la Sécurité sociale, seulement, estiment que leur direction prend en compte la dimension humaine dans leurs décisions.

Rappelons que le travail, en soi, est une part intégrante du [commun] : agir ensemble pour la communauté, en vue d’atteindre une ambition partagée, en dehors de tout intérêt autre que celui de la communauté. « Le travail n’est pas une marchandise. » [29]. Il s’agit de susciter l’innovation sociale au cœur de la philosophie coopérative d’un [commun] [30] ?

Un [commun] abandonné !

Autre aspect inquiétant, la perception des citoyens eux-mêmes… Bien que fortement ancrée au sein de la population, l’âme de la Sécurité sociale montre des signes d’étiolement. Son rôle indispensable en matière de cohésion sociale se fissure au sein de la population. Les citoyens basculent progressivement vers une attitude de consommateurs, et non plus de co-acteurs du système. Signe le plus emblématique de cette tendance, la carte Vitale remise à 16 ans devient la carte bleue (et non plus verte) des prestations de santé.

À la question : « A qui la protection sociale doit-elle bénéficier ? » [31], seulement 69 % des personnes interrogées répondent « A tous » en 2014, alors qu’elles étaient près de 86 % à choisir cette réponse en 2004. Nous pouvons interpréter cette évolution par une perte de l’envie de solidarité de - 17 points en dix ans. Dans le même temps, les personnes répondant « Uniquement à ceux qui cotisent » progresse de + 13 points marquant, semble t’il, une nette tendance pour une préférence à un système assurantiel non solidaire. La Sécu n’est plus perçue comme un filet de sécurité pour tous, ou un revenu de solidarité à long terme. Elle est vécue, dans un climat de crise économique généralisée, comme une charge de court terme ou comme une charge injuste au regard du bien-être perçu de plus en plus faible qui lui est associé dans une perspective d’immédiateté.

D’autres études soulignent ces mêmes tendances, avec plus ou moins de nuances… A la question « Parmi les domaines suivants d’intervention de l’État, sur lesquels les pouvoirs publics devraient-ils faire porter prioritairement leurs efforts ? », 19 % seulement des personnes interrogées citent explicitement la Sécurité sociale [33]. Mais elles sont 60 % à citer l’emploi et la lutte contre le chômage, 38 % à citer la santé publique, 26 % à citer la fiscalité et les impôts et 22 % à citer le logement… autant de domaines liés de près ou de loin à l’institution Sécurité sociale. La même étude de 2014 indique que seulement 47 % des personnes interrogées ont une opinion favorable de la Sécurité sociale, alors qu’elles étaient 62 % à le penser en 2005 (-15 points en neuf ans).

D’autre part, seulement 74 % des personnes répondantes [33] estiment que le « Pays ne pourrait pas du tout fonctionner sans la Sécurité sociale », et une mince majorité des répondants se dit « Tout à fait attachés à la Sécurité sociale » (66 %). Plus récemment, le mouvement des personnes souhaitant se désaffilier de la Sécurité sociale s’est renforcé [34] [35], surtout au sein des travailleurs indépendants. De même, le développement du phénomène « UberPOP » souligne un désengagement assumé vis-à-vis du système contributif [36], pour maximiser son propre enrichissement personnel [37]. Et la fraude sociale aux prestations et aux cotisations s’accentue : entre 20 à 25 milliards d’euros [38], montant bien supérieur au « trou de La Sécu ».

Quant à la gouvernance de la Sécurité sociale, dite « paritaire », elle n’est plus que le reflet d’une démocratie sociale en panne… en tout cas pour le régime général dont les représentants sont issus du terrain syndical. Outre le poids énorme de l’autorité publique dans les décisions, l’institution subit un recul massif du syndicalisme, pourtant à la source du dialogue social. Le taux de syndicalisation est passé de plus de 40 % (à la sortie de la seconde guerre mondiale) à moins de 8 % aujourd’hui. Et ils sont 78 % à répondre « non » [39], en 2015, à la question « les syndicats sont-ils encore utiles ? »… Une année noire en 2015, qui s’est traduite aussi par un 1er mai sans union des syndicats dans le défilé habituel, une première depuis 27 ans de manifestations ! FO (syndicat Force Ouvrière) et CFDT (syndicat Confédération Française Démocratique du Travail) étaient absents. Mais cette observation doit être nuancée du fait de spécificités propres à certains régimes. Les caisses de Mutualité Sociale Agricole (régime agricole), notamment, sont organisées autour d’une gouvernance mutualiste, mobilisant plus de 24.000 délégués ressortissants directs du régime [40]. C’est un stade avancé de démocratie sociale, qui suscite encore l’émulation et permet une relative coproduction en commun. Une situation renforcée par la loi du 13 octobre 2014, dite loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt, qui donne pouvoir aux instances du régime agricole, en proximité, de définir la Surface Minimale d’Assujettissement (SMA), ou encore d’accorder le maintien dérogatoire de l’affiliation.

Cette situation est d’ailleurs perçue par les usagers eux-mêmes. 55 % des répondants [1] confirment qu’il est faux de penser que « la Sécurité sociale est gérée paritairement par les syndicats de travailleurs et les organisations patronales ». Les salariés de la Sécurité sociale n’en pensent pas moins : seulement 23 % considèrent [24] que le dialogue social est constructif entre les représentants du personnel et les dirigeants de la Sécurité sociale. Le principe d’auto gouvernement de la Sécurité sociale a disparu, en tout cas pour la part majoritaire constituée par le régime général.

Ainsi, le [commun] Sécurité sociale n’est plus véritablement dirigé par ses acteurs ; la gouvernance est resserrée au sein de l’État. La participation aux processus de décisions, en local ou à une échelle plus importante, est devenue factice dans bien des cas. De même, la consommation des uns pèse lourdement sur la possible consommation des autres, avec un fossé qui se creuse entre une capacité de financement contrainte (chômage de masse, récession économique) et une masse des dépenses qui explose (vieillissement, affections de longue durée, grande précarité…). Signe évident de cet éloignement entre les acteurs de la Sécurité sociale et la Sécurité sociale elle-même, c’est l’écart entre la perception de ce qu’est l’institution et sa réalité quotidienne. 33 % des français se déclarent mal informés sur la Sécurité sociale (43 % chez les 18-25 ans) [1]. Comment un [commun] peut-il exister s’il n’a pas d’existence dans l’esprit et le cœur des membres de la communauté ? D’autant que la multiplication des réformes crée une situation d’insécurité juridique croissante, incompatible avec la compliance (capacité à respecter les prescriptions du système) et l’adhésion nécessaire au système contributif [41].

Ce désengagement collectif, au-delà de la montée de l’individualisme, est aussi la conséquence d’une perte réelle de confiance dans le système [41]. La pérennité ou la soutenabilité du modèle français est en tension, avec une large résonance médiatique autour de l’idée d’un « trou sans fond ». De même, l’accumulation des dernières réformes portées sur l’ajustement du financement, avec une générosité plus restreinte (gel des retraites, déremboursement de médicaments et forfaits payants à la charge des patients, mise sous conditions des allocations familiales…), diminue la force de séduction du dispositif au regard d’un impact durable absent en matière d’équilibre budgétaire. La défiance vis-à-vis du modèle français [42] s’en trouve renforcée, et en tout cas appelle une nécessaire réassurance des usagers et citoyens. « N’ayant plus confiance dans les institutions et leur capacité d’infléchir le réel, inquiets des risques de déresponsabilisation du modèle social et valorisant la liberté et l’autonomie individuelle. Les français tendent […] à s’affranchir du collectif pour ne compter que sur eux-mêmes. » [43]. C’est une vision injuste qui déporte la perception d’inefficacité sur le système plutôt que sur sa gouvernance. Car il faut souligner, au contraire, une extrême efficacité des organismes de Sécurité sociale, qui mobilise moins de 5 % des flux financiers gérés pour leur gestion propre : salaires, technologies, matériels et immobilier du système [24]. Une proportion bien éloignée des coûts de gestion d’une société privée d’assurance dont l’activité est comparable.

Au-delà des réformes touchant directement à notre système de Sécurité sociale, les changements connus dans l’organisation des collectivités territoriales et la répartition de leurs compétences doit nous interroger sur l’éparpillement décisionnel et la dilution du pouvoir de décision et d’agir. Cet état de fait n’est pas compatible avec la gouvernance d’un [commun]. Certes, les rapprochements entre l’action sociale territoriale et les prestations de Sécurité sociale s’accentuent : APA (allocation personnalisée autonomie) ; RSA (revenu de solidarité active) ; AAH (allocation adulte handicapé). Ce pourrait être une vraie opportunité d’optimiser l’efficacité sociale [44] en mobilisant l’expertise de l’institution et la connaissance des territoires par les collectivités, face à des réalités très hétérogènes. Mais l’organisation territoriale de la compétence sociale s’éloigne du maillage des organismes de Sécurité sociale. Ces derniers sont sous l’influence régionale (et même interrégionale), en terme de structures, et nationale en terme de décision stratégique et opérationnelle, alors que l’action sociale territoriale évolue de son côté entre le département et les intercommunalités [44], selon l’esprit des lois MAPTAM (2014) et NOTRe (2015).

Ces quelques éléments, non exhaustifs, confirment que le [commun] Sécurité sociale n’est plus… La Sécu n’est plus cette « … communauté de personnes, unie par le même désir de prendre en charge une ressource dont elle hérite ou qu’elle crée, et qui s’auto-organise de manière démocratique, conviviale et responsable pour en assurer l’accès à l’usage et la pérennité, dans l’intérêt général et le souci du bien vivre ensemble » [45]. Bien que son utilité sociale demeure au travers de ses prestations, la Sécurité sociale contemporaine ne bénéficie plus aujourd’hui des critères constitutifs d’un [commun]. Il y a absence de modalités participatives de gouvernance. L’exclusivité des prestations se renforce, avec des critères toujours plus stricts d’attribution et une accessibilité réelle bien loin des intentions affichées : 36 % des allocataires potentiels du Revenu de Solidarité Active – RSA socle - et 68 % du RSA activité n’ont pas recours à leurs prestations [46] par exemple. De même, le chômage de masse remet en cause l’universalité initiale fondée sur le statut professionnel dans la logique Bismarckienne : la Sécu porte aujourd’hui des caractéristiques fortes d’exclusivité. Ce n’est plus que l’illusion de ce qu’elle fût un jour… une illusion tiraillée entre le modèle assurantiel historique et une ambition contemporaine d’universalité. Les acteurs de la communauté française n’adhèrent plus au projet collectif Sécurité sociale, ou au mieux n’en n’ont plus suffisamment une juste conscience. Les tensions s’accentuent autour de notre modèle de Sécurité sociale ; 47 % des usagers déclarent que l’État est trop protecteur en matière de social [47]. Cette unité brisée, par rapport à l’élan collectif de 1945, entraîne un repli sur des positions individualistes synonymes de solutions privées, type assurances, loin de l’ambition originelle de solidarité partagée.

Ce constat ne doit pas occulter les réussites de notre Sécurité sociale depuis 70 ans : l’élargissement et le renforcement de la protection sociale aux indépendants ; la convergence en marche des régimes (retraites publiques et retraites privées par exemple) ; la mise en œuvre de la Couverture Maladie Universelle (CMU), instaurée en 1999 ; les aides aux familles qui permettent par exemple un meilleur équilibre entre vie professionnelle et vie de famille lors de l’arrivée d’un enfant ; l’allongement de la durée moyenne de vie, grâce à un système de santé plus abouti et de nombreuses offres de service créées... Non, ce constat doit plutôt nous conduire à nous ré-impliquer dans ce que nous avons de commun, et à sauver le dernier bastion d’une démocratie participative institutionnalisée autour des [communs], contribuant au bien vivre ensemble, dans un contexte généralisé où les pouvoirs ont plutôt tendance à se concentrer autour d’une élite de décideurs. Ce constat doit nous inciter à sauver le [commun] Sécurité sociale que nous souhaitons collectivement pour nous même, et maintenir un modèle innovant de gouvernance en dehors de l’autorité publique et institutionnalisé.

Plaidoyer pour sauver le [commun] Sécurité sociale

Fidèle à l’esprit du Conseil National de la Résistance, une autre voie est pourtant possible. Une alternative ambitieuse en faveur de la cohésion sociale et des solidarités, une alternative innovante en matière de démocratie sociale. C’est ce que nous croyons !

De même que la crise écologique évidente appelle une transition énergétique d’urgence et d’ampleur, la crise sociale doit nous conduire à renforcer les solidarités et la justice sociale… c’est-à-dire une transition sociétale, une « politique de l’humanité » [48] en faveur de l’humain, au détriment du profit [49]. La Sécurité sociale, dans son âme initiale de [commun], est la solution. Une solution d’autant plus adaptée dans le contexte de défiance généralisée. La confiance entre le peuple et les décideurs est brisée… la probité et la responsabilité des porteurs de l’éthique publique est mise en cause. Notre démocratie toute entière pourrait en pâtir. Le modèle de gouvernance de la Sécurité sociale, en tant qu’exemple de gouvernance des [communs], permet d’envisager une alternative institutionnalisée face à la dichotomie entre des citoyens démobilisés du fait politique et des décideurs éloignés du terrain.

Bien entendu, il ne s’agit pas ici d’une démonstration scientifique, aboutissant à promouvoir un modèle français plutôt conservateur-corporatiste, d’inspiration Bismarckienne [50]. Non. C’est très modestement une croyance philosophique, à l’instar de ce que décrit Abd Al MALIK à propos de la laïcité [51]. La croyance d’un citoyen impliqué parce que, sans doute, mieux informé de l’intérieur. C’est le résultat d’une conscience éveillée, émoustillée par des ouvrages passionnants, et éclairée par l’expérience vécue. Mais c’est surtout la traduction de l’intention, indigné [52], d’ouvrir le débat, de déclencher l’insurrection des consciences et d’aider à tracer « le chemin de l’espérance » [53] pour une belle fraternité pérenne autour du [commun] Sécurité sociale, avec une inspiration Beveridgienne plus affirmée : sociale démocratie.

Au-delà du débat, ce plaidoyer rassemble et dessine des pistes de transformation pour sauver l’âme de la Sécurité sociale. Ces propositions sont loin d’être exhaustives et parfaites ; elles ne demandent qu’à mûrir à la lumière des échanges et des débats qu’elles vont engager, je l’espère, dans les sphères Sécurité sociale et citoyenne.

Réaffirmer le rôle majeur de la Sécurité sociale, et en étendre le périmètre autour de l’idée de protection sociale, notamment sur les facteurs de cohésion sociale que sont le logement, et l’emploi. La Sécurité sociale continuerait de porter, ainsi, haut et fort l’ambition de « permettre à chaque personne d’accéder à l’éducation et aux ressources nécessaires pour assurer un mode de vie durable, et offrir la Sécurité sociale et des mesures de protection à toute personne qui ne peut subvenir à ses propres besoins. » [54]. Concernant le logement, l’utilisation du Fonds de réserve des retraites, actuellement placé inutilement sur les marchés financiers, est de nature à dynamiser les potentialités du système de Sécurité sociale grâce à un apport légitime d’une masse financière détournée. Concernant l’emploi, nous adhérons à la proposition de tendre vers le système canadien [55], permettant de réduire le temps de travail de 20 % ainsi que la rémunération selon le même taux, avant tout licenciement économique ; la perte de revenu serait compensée par la Sécurité sociale.
Transformer le modèle de gouvernance de la Sécurité sociale, pour créer un dispositif fédératif [56] autour d’un pouvoir de décision et d’agir renforcé en local, et d’une force de coopération et coordination organisée au niveau national. Ce n’est pas tant la structure des organismes actuels de Sécurité sociale qui est en jeu, mais bien leur rôle respectif et leurs modalités de gouvernance. Le modèle mutualiste du régime agricole apparaît intéressant de ce point de vue.
Re-territorialiser la Sécurité sociale en proposant « un cadre contractuel de partenariat systématique, fondé sur l’intégration des prestations sociales dans une stratégie territorialisée de développement social local » [44]. Cela pourrait se traduire par un projet social de territoire commun, piloté dans le cadre d’une conférence sociale de territoire, associant les citoyens, les organismes de Sécurité sociale et les collectivités territoriales.
Transformer les processus de décision en matière de Sécurité sociale, mobilisant des organismes dirigés par des instances réunissant citoyens, experts, opérateurs et partenaires [57]. Il s’agit de permettre l’apprentissage, le débat, et la décision en commun [58] sur ce système qui concerne tout le monde dans son quotidien : « Soutenir la société civile locale, régionale et mondiale et promouvoir une réelle participation de toutes les personnes et organisations intéressées dans la prise de décision » [59]. Ici encore, le régime agricole est un exemple à prendre en compte en la matière.

À ce sujet, nous relevons la pertinence du processus de conférence citoyenne décrit par la Fondation des sciences citoyennes [60]. Ce modèle devrait inspirer cette proposition.

Sanctuariser le budget de la Sécurité sociale, en dehors du budget de l’État, pour éviter un détournement du [commun] Sécurité sociale à des fins idéologiques (politiciennes) par les gouvernements ; ce faisant, organiser un débat pluriannuel sur la Sécu, dans le cadre d’une démarche participative éprouvée, avec les citoyens, pour voter une loi cadre de Sécurité sociale portant sur les orientations et l’utilité sociale des dispositifs.
Garantir une redistribution des richesses en réinventant l’assiette des cotisations sociales, pour une plus grande justice sociale [61]. Cette redistribution doit prendre en compte toutes les richesses (revenus du travail, revenus des capitaux, patrimoines) et réduire les inégalités [3], alors que l’écart entre les revenus les plus faibles et les plus élevés approche un rapport inacceptable de 1 à 650. Elle doit également trouver la voie pour assumer nos choix en matière de protection et de progrès social, dans le cadre d’un meilleur équilibre financier qui ne doit pas endetter les générations futures.
Poursuivre le mouvement d’universalisation pour dépasser le lien entre Sécurité sociale et statut professionnel, en investiguant sans tabou et sans arrière pensée, les opportunités de transformation des régimes et des prestations [62]. L’ambition est ici de poursuivre l’œuvre initiée en 1945, permettant à chacun, de façon égalitaire, de bénéficier de la même protection devant les risques de la vie en société, quelle que soit sa situation. Pour cela, la création d’un revenu universel minimum de base apparaît comme une voie intéressante pour renforcer la solidarité. Signalons également la mise en place prochaine (1er janvier 2017) du compte personnel d’activité, qui va dans le sens d’une déconnexion entre les droits en matière de protection sociale et la situation professionnelle. C’est la loi du 23 juillet 2015 relative le dialogue social et à l’emploi qui instaure ce nouveau dispositif attaché à la personne, et non plus au statut. Mais ce compte personnel s’attache à la protection contre le chômage et à la formation professionnelle ; il ne couvre pas tous les champs de la Sécurité sociale.
Valoriser le rôle et les réalisations de la Sécurité sociale... en créant un bilan annuel et individuel des contributions versées et des prestations reçues ;… en investissant dans la communication autour de la marque Sécurité sociale, comme c’est le cas en 2015 avec la dynamique [63] mise en place pour l’anniversaire des 70 ans de la Sécurité sociale.
Rénover le modèle managérial de l’institution, en investissant véritablement dans l’esprit collectif autour des ambitions socles de bien être au travail et de développement durable. La norme ISO 26000 relative à la responsabilité sociétale des entreprises [64] pourrait, dès lors, constituer une première marche dans cette voie.
Poursuivre le mouvement d’efficience de la Sécurité sociale, au seul bénéfice de la qualité du service rendu, et de l’utilité sociale du dispositif. Les systèmes de management par la qualité apparaissent comme une voie favorisant l’apprentissage de l’amélioration continue. Mais surtout, des démarches d’évaluation, pluralistes et participatives [65], de l’utilité sociale pourraient être généralisées à la fin de chaque période pluriannuelle (démarche intégrée, au cœur de la loi cadre décrite précédemment).
Instituer un enseignement ambitieux de la Sécurité sociale [66], dès le collège / lycée pour le socle citoyen des connaissances en la matière, via une plus large présence de la thématique dans les programmes scolaires et la création d’outils pédagogiques adaptés [67]. Créer une filière universitaire en matière de Sécurité sociale, au-delà de l’école réservée à la formation de ses dirigeants, réunissant plusieurs disciplines des sciences sociales, politiques, économiques et citoyennes, pour garantir une recherche et des développements utiles, à large spectre, en matière de protection sociale.

Conclusion

Voici posées les bases d’une (r)évolution tranquille de notre modèle de Sécurité sociale… à côté de toutes celles impulsées de manière invisible, ici et là [68] ! Comment ne pas imaginer qu’un pays (la France), symbole de la liberté et de la démocratie, ne pourrait pas s’émanciper [69] du carcan capitalistique et juridique pour conduire, aussi, sa (r)évolution en faveur du bien vivre ensemble. « D’une manière douce, nous pouvons secouer le monde. », disait GANDHI. Avec cette contribution, c’est bien cette (r)évolution que je propose d’impulser dans la perspective de transformer notre modèle et de garantir la survie d’une vraie démocratie instituée et des conditions d’une fraternité collectivement désirée. Grâce au référendum d’initiative partagée notamment [70], nous pouvons le faire. Nous avons su nous rassembler en masse autour du Conseil National de la Résistance en 1945 ; plus récemment, nous avons encore été nombreux à nous réunir autour de préoccupations communes (mouvement « Je Suis Charlie », en janvier 2015). Nous saurons le refaire. A nous de jouer...

Voir en ligne :

Le Blog de Gaël Drillon

[1Harris Interactive et Ucanss – Union des caisses nationales de Sécurité sociale, 2015

[2DUPEYROUX Jean-Jacques. La Sécurité sociale au carrefour. [IN] : Droit social n° 5, 1960.

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[5Réseau Francophone autour des biens communs, 2013

[6OSTROM Elinor. Gouvernance des biens communs. Pour une nouvelle approche des ressources naturelles. Éditions De Boeck, 2010.

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[8Charte Woman Share. « Notre qualité de vie sur la planète […] dépend de la reconnaissance, par nous-mêmes, de notre pouvoir collectif ». www.womanshare.com, consulté le 4 juin 2015.

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[11MANIER Bénédicte. Un million de révolutions tranquilles. Comment les citoyens changent le monde. Éditions Les liens qui libèrent, 2012.

[12GADREY Jean. Alternatives Économiques, Poche n° 022. Janvier 2006.

[13GIRAUD Gaël. L’illusion financière. Les éditions ouvrières, 2013.

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[15LECORNU Michel. La Sécurité sociale au service de l’intérêt général. Mémoire de D.E.A. d’administration publique, 1977.

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[25CHABOT Pascal. Global burn-out. Presses universitaires de France, 2013.

[26DE GAULEJAC Vincent et HANIQUE Fabienne. Le capitalisme paradoxant. Un système qui rend fou. Éditions du Seuil, 2015.

[27ARENDT Hannah. La condition de l’homme moderne. Éditions Pocket (collection Agora), 2002.

[28MAUGERI Salvatore. Contribution sur la financiarisation. [IN] : La nouvelle revue du travail n° 3/2013, mis en ligne le 26 octobre 2013, consulté le 02 mars 2015. http://nrt.revues.org/1175.

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[33Institut Paul LOUVRIER. Les services publics vus par leurs usagers. TNS Sofres, janvier 2015.

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[68MANIER Bénédicte. Un million de révolutions tranquilles. Comment les citoyens changent le monde. Éditions Les liens qui libèrent, 2012.

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