L’intervention de François Ulrich sur le rapport d’orientations budgétaires
mercredi 1er février 2023, par
PolitiqueConseil municipalBudgetFinanceVous trouverez ce que notre groupe, UNI·E·S Pour Beaumont, pense du rapport d’orientations budgétaires à travers l’intervention de François Ulrich lors du conseil municipal du mardi 31 janvier 2023.
Vous venez de nous présenter ce que vous appelez un peu pompeusement vos orientations budgétaires. Pompeusement parce que nous les avons désespérément cherchées ces orientations, et qu’il faut bien avouer que ce document est surtout un document préparatoire à usage interne pour l’établissement du budget.
D’ailleurs vous le reconnaissez vous-mêmes dans le titre de votre paragraphe B p.15 : « Les orientations budgétaires retenues pour 2023 : entre rigueur de gestion et optimisation des moyens, recettes et sources de financement ». Sérieusement, vous connaissez des exécutifs de collectivité territoriale qui ne souhaitent pas être rigoureux dans leur gestion, gérer au mieux leurs moyens et optimiser leurs recettes ?
Mais au fond, il n’y a là rien d’étonnant. Il suffit de lire votre analyse du contexte général. En lisant le titre p. 3, on a l’impression d’être dans les années 1950 ou 1960 puisque selon vous le dérèglement climatique n’a aucun impact sur le contexte général et ne mérite même pas d’être mentionné. Mais votre titre laisse encore un petit espoir de vous voir vous intéresser aux gens car il annonce une analyse de la situation économique, sociale et financière. Espoir rapidement déçu parce que le mot « social » est apparu pour la seule et unique fois dans ce document de 32 pages ! Et au final, votre analyse du contexte général se résume à celle de la situation financière et économique (A) et du contexte des finances publiques (B). Vous voilà de retour dans la France macroniste où l’homme est réduit à l’homo œconomicus, lequel, s’il ne s’en sort pas ou mal, est évidemment le seul responsable.
Au moment où le gouvernement Macron veut imposer une réforme des retraites qui est une attaque d’ampleur contre la protection sociale, qui fait surtout payer le coût de la réforme aux personnes à bas salaires et ayant commencé à travailler tôt, et qui accélère la baisse en cours du niveau de vie des retraités par rapport aux actifs, force est de constater que pour vous aussi l’augmentation de la précarité et de la pauvreté ne mérite aucune attention, puisque nous ne trouvons aucune trace de la moindre orientation en matière de politique sociale. Et pourtant le volume des aides demandées au CCAS de Beaumont augmente. D’ailleurs vous devez savoir encore mieux que nous que, par exemple, les montants maximums respectifs des secours d’urgence et exceptionnel sur un an sont respectivement fixés depuis 15 ans au moins à 80€ et 300€ (montant d’ores et déjà assez régulièrement dépassé d’ailleurs) et que rien qu’en tenant compte du taux d’inflation ils devraient être portés à minima à 96€ et 360€. Mais selon vous rien de suffisamment important qui doive orienter vos choix budgétaires. Les contraintes budgétaires que vous imposez au CCAS font d’ailleurs que dans le projet de modification du règlement des aides sociales les plafonds dont je parlais restent maintenus à 80 et 300€.
Le réchauffement climatique et la chute de la biodiversité ne vous inquiètent pas davantage, ou en tout cas pas suffisamment pour être pris en compte dans vos choix budgétaires.
Rassurez-vous : je vous avais parlé l’an dernier du rapport du GIEC et de la budgétisation environnementale proposée par l’OCDE. Je n’y reviendrai pas, puisque visiblement ceci ne vous intéresse pas.
Donc, à la lecture de ce document qui est censé préciser vos grandes orientations budgétaires, il apparaît que vous n’avez aucun projet d’envergure pour adapter notre ville au dérèglement climatique, aider nos concitoyens en difficulté ou d’ailleurs développer une politique culturelle.
Vous allez me répondre Cœur de Ville et école Jean Zay. Nous y reviendrons au cours de conseil et je ne vais donc pas m’étendre. Mais vous aviez une opportunité exceptionnelle de changer notre ville avec le projet InspiRe, une maîtrise foncière importante et sans doute jamais atteinte au centre-ville, une école à rénover avec un projet à 10 millions d’euros, et vous avez raté le premier, et traité les deux autres sans vision globale.
Ce rapport 2023 acte vos échecs et marque votre obstination à refuser d’entendre tout ce qui ne dit pas exactement comme vous.
Et pourtant vous devriez ! Cela vous éviterait au moins de reprendre sans même y faire attention des phrases aussi absurdes que, je vous cite, « modérer l’endettement pour ne pas hypothéquer les générations futures ». Peut-être aussi dans un souci d’honnêteté, vous pourriez préciser que si vous n’augmentez pas les taux d’imposition sur le foncier à Beaumont, vous votez toutes les augmentations à la métropole, qu’elles soient fiscales ou tarifaires (taxe sur les ordures ménagères dont le taux est passé de 7,99 % à 9,90 % entre 2021 et 2022 soit une augmentation de près de 25 %, l’eau et l’assainissement avec une augmentation en 2023 de 34 %, les transports en commun où le ticket acheté dans le bus est passé de 1,60 à 2€). Vous pourriez également souligner que les valeurs locatives vont augmenter de 7,1 % ce qui va avoir un impact significatif sur le montant des taxes foncières payées par les propriétaires.
J’ai une question très précise sur vos prévisions budgétaires 2023 concernant le chapitre 012, c’est à dire les charges de personnel. En page 16, vous prévoyez une augmentation de 3,54 %, et en page 20, il est écrit que le même chapitre devrait connaître une augmentation de 5,26 % environ. Il doit y avoir un problème de communication entre l’adjoint aux finances et l’adjoint aux ressources humaines…
Enfin, pour ajouter à la complexité, toujours sur ce même chapitre 012, si l’on prend les 6 000 000€ annoncés dans votre graphique p.16 et qu’on les compare aux 5 708 288€ retenus dans le CA prévisionnel 2022 p. 11 on trouve une variation de +5,1 %.
Trois taux d’augmentation différents en 5 pages pour un même chapitre, ça c’est de la rigueur ! Nous espérons que vous aurez réussi à faire un choix rationnel d’ici la présentation du budget.
Je terminerai par deux remarques sur le Plan Pluriannuel d’Investissements.
La première concerne vos prévisions sur l’épargne brute de la collectivité et l’encours de la dette. Vous avez retenu un taux d’emprunt de 2 %, ce qui semble actuellement d’un optimisme exagéré peu compatible avec une gestion rigoureuse. En effet, il est plus que probable que les taux se situent près de 4 %. En retenant cette hypothèse, on arrive à un surcoût cumulé pour la collectivité d’environ 50 000€ en 2026. Si l’on ajoute que dans vos prévisions sur les charges de personnel vous n’envisagez aucune augmentation du point d’indice, et sur les charges générales une augmentation de 1 % très en-dessous de l’inflation, il y a de quoi être inquiet.
Vos prévisions en matière d’épargne brute et de CAPDES sont donc certainement très optimistes, et il n’est pas irrationnel d’envisager, à partir de vos données et de vos chiffres, et en restant dans la marge d’incertitude, la possibilité qu’en 2026 la commune se retrouve avec une épargne négative.
La deuxième concerne la réalisation du centre technique municipal. Il est très difficile, sans explication et sans débat, d’admettre que cette réalisation soit plus urgente que la réfection du CAB.
Comme je l’ai dit, je crains que les quelques réflexions que je viens de vous livrer n’ébranlent en rien vos certitudes. Je vais donc me permettre de conclure en citant Albert Einstein en espérant que ce nom éveille au moins votre curiosité. Je le cite : « Le souci de l’homme et de son destin doit toujours constituer l’intérêt principal de tous les efforts techniques ; ne jamais l’oublier au milieu des diagrammes et des équations ».