Antoine Maradeix : une inquiétante ré-écriture de l’histoire

jeudi 10 octobre 2013, par Le Bureau

PolitiqueHistoire

Dans un tract intitulé « Ensemble pour l’avenir de Beaumont », de nombreuses contre-vérités s’enchaînent. Mais, ce qui trop énorme est insignifiant et ne leurre que les naïfs. Par contre, de façon insidieuse, un article conséquent évoque l’action politique d’Antoine Maradeix.
Outre les erreurs et lacunes nombreuses, la présentation est très inquiétante.

Erreurs et oublis

Parmi les erreurs et oublis, citons simplement que si Antoine Maradeix a bien été largement accusé par la police de la Monarchie, il a été acquitté lors d’un procès (en 1842) qui lui a permis de défendre ses positions et convictions républicaines.
De même, il n’est pas mentionné que ce sont 69 % des Beaumontois qui lui ont accordé leur confiance en juillet 1848 (au suffrage universel masculin).

Antoine Maradeix a très fortement marqué son époque et la vie beaumontoise et de la région clermontoise pendant de longues années.

Mais le plus grave n’est pas là.
Le plus grave est l’angle choisi dans la présentation d’Antoine Maradeix et de son action.

En effet, quelle image est donnée ?

Reprenons les termes employés dans ce tract : « agitateur public », accusé de « faits d’insurrection, incendies en bandes et attaques de biens publics », condamné à la déportation à Cayenne, considéré comme principal chef « des sociétés secrètes insurrectionnelles ». Et pour conclure, il est fait état d’ « échauffourées graves durant plusieurs jours, avec échanges de coups de feu avec les forces de l’ordre ... ».

Le rédacteur de cet article reprend et valide donc les accusations formulées par les pouvoirs en place, pouvoirs contre lesquels luttait effectivement Antoine Maradeix.

Tout d’abord celui d’une monarchie (dite « de juillet » entre 1830 et 1848) qui refusait le droit de vote à plus de 90 % de la population.
Ensuite, celui du régime impérial de Louis Napoléon Bonaparte qui bafouant les institutions avait anéanti la Seconde République par le coup d’État du 2 décembre 1851 et qui a effectivement condamné Antoine Maradeix à la déportation et fait donner la troupe à Beaumont.

Il s’agit donc d’une opposition déterminée dont tous les républicains peuvent être fiers.

L’Histoire est riche de tels personnages qui, en certaines circonstances, incarnent une volonté et une fermeté dignes d’éloges. Certains marquent l’histoire locale, comme Antoine Maradeix. D’autres marquent la grande histoire.
Mais, dans les deux cas, les pouvoirs en place usent des mêmes arguments pour les discréditer.
C’est la règle de la lutte politique. Ce qui est grave et inadmissible, c’est de marcher dans les pas des adversaires des causes justes et de reprendre voire d’accréditer, ainsi que le fait cet article, les termes utilisés.

Rappelons-nous

Nous avons retrouvé trace de condamnations comparables à celles ayant affecté Antoine Maradeix. Un cas a particulièrement retenu notre attention.
Citons : « condamnation à la peine de mort ... confiscation des biens meubles et immeubles du condamné » aux motifs suivants « Trahison. Atteinte à la sûreté extérieure de l’Etat. Désertion ... agissements nuisibles ». Bref, toute une panoplie d’actes d’une gravité autrement supérieure à ceux imputés à Antoine Maradeix.
Le dangereux citoyen qui a mérité ces accusations et condamnations s’appelait Charles de Gaulle !

Il est, me semble-t-il, parfois légitime et glorieux d’opter pour une « vie insurrectionnelle ».