Quelques pistes de réflexions … après les récents attentats de Paris

mardi 17 mars 2015, par J. Giraud

PolitiqueDémocratie

De la démocratie

Démocratie ou république ?

Les symboles dans la cité de la démocratie sont l’église, le temple, la synagogue ou la mosquée (liberté de croire), la gare, l’aéroport, la rue (liberté de bouger), le supermarché (liberté de consommer) … Rien que des libertés individuelles : moi, moi, moi. Et même liberté de publier un selfie pris dans une manifestation évènementielle rassemblant une France bien blanche, bien nourrie et bien pensante qui défend et achète un journal qu’elle n’a jamais lu. Les symboles de la république seraient davantage l’hôpital (santé pour tous), l’école (éducation pour tous), la mairie (exercice de la citoyenneté) et même la prison (protection des citoyens). La république se préoccupe d’abord du bien commun, du vivre ensemble, de la cohésion sociale. La démocratie se préoccupe d’abord de la défense des droits individuels en privatisant la liberté. Et dans les sociétés libérales, l’excès de l’individualisme conduit au culte du moi, à l’injonction au bonheur qui est une injustice profonde et au rejet objectif de l’autre. Le respect des droits naturels que sont la liberté, l’égalité, la sécurité et la propriété devient en démocratie, le libéralisme alors que la liberté pouvait être considérée par les républicains comme une sortie de la servitude, le résultat d’une libération. Pour les anciens, être libre c’est faire partie d’un groupe social libre, non soumis à la loi de l’étranger ; c’est le contraire d’être esclave.

Liberté, Egalité, Fraternité …

Se mobiliser pour la liberté ou l’égalité, c’est souvent réclamer plus de liberté pour soi ou plus de justice à son égard. Il faut un oppresseur suffisamment tyrannique pour qu’une action collective visant à une libération du peuple voie le jour. Quant à manifester ensemble pour la justice pour autrui, c’est encore plus rare ! Et la fraternité alors ? Attention, être frères, ce peut être ‘frères d’armes’, tous unis contre l’étranger ou bien frères dans la foi, partageant les mêmes convictions au sein de son groupe, exclusif. Au terme de fraternité, substituons le terme de justice sociale. La solidarité, la justice sociale est le ciment qui permet à une société de favoriser le bonheur de ses membres (cf. J.J. Rousseau) en visant le bien commun. Dans une société bien faite, ce sont aux ‘nantis’, à ceux qui possèdent le pouvoir, l’intelligence, la santé, la force etc. de veiller au bien-être des plus défavorisés. En redistribuant les richesses et pas seulement les espèces sonnantes et trébuchantes ! Pour être solidaires, il nous faut être capable d’un minimum d’empathie, d’une volonté farouche de voir en chaque homme une dignité inaliénable (qui fait son caractère humain) à respecter et à protéger. Voilà une belle utopie directrice qui ne devrait pas conduire à une nouvelle barbarie future alors que renoncer à cette utopie laisse le champ libre à une barbarie actuelle.

Penser autrement

La crise est bien là et il ne s’agit pas d’une crise économique mais d’un profond changement dans notre manière d’appréhender le monde. Comment voir clair, ne pas emprunter de fausses pistes, garder le cap, et lequel ?
Il nous faut préserver notre esprit critique. Eduquer à la remise en cause. Toujours se méfier des unanimités cache-misère. Toujours douter devant des vérités assénées. Devant ce qui choque ou bouscule, chercher le pourquoi des choses. Rechercher l’information et non la communication. Pendant que des attentats bouleversaient Paris, au Nigéria, Boko Haram assassinait à tour de bras des centaines peut-être des milliers d’africains. Notre indignation ne doit pas être sélective.
Répétons-le : il nous faut construire une spiritualité universelle et non-violente basée sur le respect de la dignité inaliénable de chaque être humain et libérée du joug des religions passéistes.
Il nous faut apprendre, comprendre et éduquer en tenant compte des cultures qui ne sont pas les nôtres. Rester éveillés, curieux, ouverts à l’inconnu.
Il nous faut lutter véritablement pour la justice sociale, le bien commun, le social, le collectif plutôt que la satisfaction des besoins individuels.
Il nous faut des contre-pouvoirs efficaces, ne pas se laisser diriger par les forces de l’argent, les mafias, les militaires et les assoiffés de gloire, de prestige et de notoriété.
Il nous faut être révolutionnaire, en permanence : « rien n’est jamais acquis à l’homme ni sa force ni sa faiblesse. » (cf. Louis Aragon)
Il nous faut accepter que la liberté comporte des contraintes : « La colombe qui ressent la résistance de l’air pense que sans air, elle irait plus vite. » (cf. Emmanuel Kant)
Et en plus, il nous faut vivre dans un monde imparfait, en faisant des compromis mais en ne franchissant jamais la ligne rouge qui nous ferait nous renier. Notre conscience doit être notre garde-fou.
Il nous faut penser autrement ; c’est urgent.